l’AC-130 Gunship

L’AC-130 Gunship… Rarement un avion aura été autant synonyme de puissance et de déluge de feu, notamment dans les films, mais aussi les jeux vidéo. Les vieux gamers comme moi se souviennent sans doute de la mission « la mort venue du ciel » de CoD Modern Warfare (voir vidéo), et les plus jeunes ont pu jouer à un jeu mobile plutôt réaliste. Mais un Gunship, c’est quoi en réalité?

AC-130 Gunship simulator (2017)

 

Le principe du « Gunship »

 

L’appui-feu rapproché (ou CAS, pour Close Air Support) consiste, pour un avion, à effectuer un passage à basse altitude pour apporter, avec ses canons, mais aussi ses bombes, ses missiles ou ses roquettes, un soutien direct à une unité au sol. 

Durant la guerre du Vietnam, l’US AIR FORCE expérimente une nouvelle méthode de CAS, non plus par attaque directe, mais, en utilisant la manœuvre du « pylon turn », qui consiste à faire tourner un avion autour d’un point fixe, par un tir latéral. 

Le concept de Gunship (canonnière) est né : le premier modèle est le Spooky, un vieux Dakota de la Seconde Guerre Mondiale équipé de miniguns sur son côté droit et engagé principalement pour aider les forces spéciales isolées au cœur du territoire ennemi. L’engin manque de puissance de feu, mais le concept est validé.

 

Un Hercules de combat

 

Le C130 Hercules est une bien meilleure base de travail et, dès 1968, une première version du Gunship (qui se voit rajouter un A pour Attack) intervient en Asie du Sud-Est. Elle est, elle aussi, équipée de miniguns, mais aussi de canons à tir rapide de 20mm et, par la suite, de 40mm et même de 102mm. 

Constamment modernisés pour une puissance de feu et une précision accrue, les AC-130 sont engagés dans la plupart des opérations américaines en Amérique Latine, pendant la Guerre du Golfe et dans les Balkans. Avec le début des interventions en Iraq et en Afghanistan, ils sont aussi massivement utilisés au sein d’escadrilles affectées aux Forces Spéciales. 

Aujourd’hui, le nouveau standard du Gunship est l’AC130J Ghostrider, qui emporte plus de munitions et qui est, en plus de ses tirs directs, capable de lancer des missiles et des bombes guidés par laser. Il est aussi en mesure de travailler de manière extrêmement efficace avec les drones, notamment les Reaper, pour la désignation de cibles.

 

Une icône intouchable ?

 

En réalité, l’AC-130 n’est pas indestructible : 9 ont été abattus (8 au Vietnam et un en Iraq en 1991) et plus de 60 membres d’équipage tués depuis sa mise en service. L’avion est lent et vole bas, et il est donc à la merci de la plupart des armes antiaériennes, y compris les plus sommaires. 

Pourtant, il est très présent dans les films et les jeux vidéo, et il est devenu une sorte d’icone américaine pour au moins deux raisons : il n’est utilisé que par l’Air Force et délivre une puissance de feu unique, en particulier au cours d’opérations spéciales ou clandestines. 

Il est donc logiquement présent dans beaucoup de FPS et de shooters, ainsi que dans de nombreux films. Et ce mythe tourne parfois à l’absurde, comme dans « La chute de la Maison Blanche » où un AC-130 équipé d’armes sur les deux cotés du fuselage abat des avions de chasse !

 

Il y a beaucoup d’opportunités scénaristiques et de Gameplay à tirer de l’AC-130, à condition peut-être de sortir des clichés et de proposer des options originales.

Le casque tactique

Ces 20 dernières années, les casques de combat on fait d’énormes progrès en termes d’ergonomie et de modularité. Aujourd’hui, ils ne sont plus une simple protection, mais bien un élément central de l’interaction entre le soldat et son environnement. Et pourtant, cette modularité est largement sous-exploitée dans le jeu vidéo, où le casque reste, globalement, un Skin sans grande importance…

Ghost Recon Breakpoint (2019)

 

Un besoin spécifique des Forces Spéciales 

Depuis presque 3.000 ans, le casque est un objet essentiel pour le combattant : il le protège des coups et des chocs, mais lui permet aussi d’affirmer son appartenance à une nation ou à un corps donné.

Au cours du XXe siècle, le casque est un produit standardisé, produit en grandes quantités pour équiper des armées de masse, mais il ne répond pas aux besoins spécifiques, notamment ceux des Forces Spéciales. Ces dernières, qui souhaitent des équipements plus légers et qui préservent leur champ de vision, s’équipent parfois, dans les années 90, de casque de skateboard ou de hockey (comme dans le film « La chute du Faucon Noir »).

 

C’est sur ces modèles de sport, qui laissent les oreilles libres et facilitent les mouvements, que sont réalisés les premiers casques spécifiques aux SF, qui s’imposent vraiment avec le début des guerres en Afghanistan et en Iraq.

 

Une plateforme modulaire

Comme les armes avec le Picatinny ou les équipements avec le MOLLE, les casques sont rapidement standardisés, et deviennent un accessoire extrêmement modulaire grâce à :

  • La généralisation de l’accroche frontale, qui permet le montage rapide des jumelles de vision nocturne, mais aussi de visières spécifiques ;
  • L’adoption de rails, globalement standardisés (mais un peu moins que les Picatinny), qui permettent de montages d’accessoires tels que des lampes, des caméras ou des lasers ;
  • La présence de larges bandes de velcro qui permettent l’ajout de plaques de blindage ou d’accessoires (notamment des batteries).

L’aspect acoustique

 

Cette évolution de forme et de fonction a aussi une grande influence sur l’intégration de systèmes de communication et acoustiques, qui ont considérablement accru l’interaction du combattant avec ses équipiers, et sa prise en compte de l’environnement.

De fait, on peut aujourd’hui adapter sur les rails des systèmes auditifs (casques, oreillettes) qui offrent plusieurs options :

  • La communication tactique : elle peut se dérouler dans de bonnes conditions, quel que soit l’environnement, et facilite donc la compréhension des ordres et la coordination de l’escouade. Les casques modernes permettent aussi la généralisation de l’ostéophonie, processus qui fait passer les sons par les os, et qui libère donc les oreilles ;
  • La protection auditive : des systèmes permettent aujourd’hui une réduction efficace des tirs, des explosions ou des bruits de moteur, pour une meilleure lucidité ;
  • L’amplification sonore : d’abord développées pour les snipers, qui voulaient pouvoir entendre les bruits environnants tout en restant concentrés sur leur tir, les « oreilles tactiques » sont aujourd’hui largement adoptées par les opérateurs, qui peuvent en un instant passer sur ce mode et sélectionner les spectres auditifs (murmures, bruits métalliques…).

On le voit, les casques de nouvelle génération offrent une infinité d’opportunités pour le gameplay, et méritent assurément mieux que de simples skins de personnage. Alors à quand un « helmet smith » aussi complet les gunsmith ? 

Le rail Picatinny

Aujourd’hui, il est difficile d’imaginer un jeu dans lequel les armes ne soient pas customisables (ici, le gunsmith de CoD : Modern Warfare). C’est aussi le cas dans la réalité, en particulier grâce à l’adoption massive, depuis une vingtaine d’années, du rail Picatinny.

La recherche de la modularité

 

A partir de la fin des années 70, un peu partout dans le monde, des ingénieurs travaillent sur des procédés pour offrir aux soldats des équipements modulaires, c’est-à-dire en mesure d’être customisés par chaque utilisateur en fonction de ses besoins. 

Cette modularité se retrouve dans les équipements personnels (avec l’adoption de plusieurs standards, dont le MOLLE), mais aussi pour les armes. L’idée est de pouvoir fixer des accessoires de manière simple, rapide et standardisée, sans avoir recours à des modifications artisanales, particulièrement appréciées des forces spéciales.

 

Le principe du rail 

 

Pour répondre à la demande de snipers, qui souhaiteraient pouvoir changer de lunettes rapidement et sans modifier leurs réglages, l’ingénieur américain William WEAVER invente, au début des années 80, un bloc de métal standardisé qui reprend, très schématiquement, le forme d’un T allongé et cranté, qui se visse sur la partie supérieure d’une arme. 

Le système est modernisé et, en 1992, l’armée américaine confie à l’arsenal de Picatinny, dans le New Jersey, la mission de mettre au point une nouvelle norme de rail de montage. 

 

Une adoption rapide

 

En 1995, le « Pic » est officiellement adopté pour les nouvelles versions des fusils d’assaut réglementaires américains, le M4 et le M16, où il remplace le traditionnel garde-main en plastique.  

Ce choix impose le Picatinny aux Etats-Unis, mais aussi au sein de l’OTAN. Avec le début des interventions en Afghanistan et en Iraq, le rail va aussi rapidement connaitre son baptême du feu et prouver son efficacité.

Dès la fin des années 90, les industriels de l’armement intègrent aussi le rail à leurs nouveaux produits, et sortent des versions modernisées de leurs armes au nouveau standard. 

Dans plusieurs pays (comme en France), des programmes sont aussi menés pour moderniser les arsenaux d’armes légères, et on trouve aussi rapidement des solutions pour customiser des armes anciennes ou, par exemple, les AK-47.

 

Les accessoires

 

Initialement conçu pour les optiques, le Picatinny va rapidement stimuler le développement de nouveaux systèmes de visée. C’est bien avec le rail que les REFLEX, les REDDOT ou les HOLOPOINT s’imposent et dépassent les cercles restreints des forces spéciales.  

Très vite, une multitude de fabricants d’accessoires vont aussi exploiter le potentiel du PICATINNY dans la prise en main et l’ergonomie de l’arme : les deux accessoires qui s’imposent le plus rapidement sont les poignées, qui modifient sensiblement la précision du tir et sa maniabilité, notamment en milieu clos, ainsi que les lampes et les lasers, qui deviennent beaucoup plus faciles à utiliser et parfaitement intégrés.

 

Au final, dans les jeux vidéo comme dans la réalité, le Picatinny a, en moins de 25 ans, profondément modifié la façon d’utiliser une arme : elle n’est plus un objet fini, mais une plateforme adaptable en fonction de la mission. 

les systèmes de vision nocturne

Depuis une vingtaine d’années, le cinéma et les jeux vidéo font la part belle aux jumelles de vision nocturne (JVN). Mais, mis à part quelques expériences visuelles extrêmement convaincantes comme Call of Duty Modern Warfare, très peu s’approchent de la réalité et des limites du système, se contentant la plupart du temps d’un filtre vert calqué sur l’écran…

CoD Modern Warfare (2007)

La nature comme inspiration, la technologie comme solution

Si, depuis la nuit des temps, l’homme a bien compris que voir la nuit procurait des avantages certains, il a aussi dû se rendre à l’évidence : même avec l’aide de  potions magiques et de grigris, il reste l’une des espèces les moins bien pourvues par la nature dans ce domaine !

C’est pourtant la nature qui va inspirer les deux principales solutions technologiques pour « voir la nuit » :

– La vision thermique : comme les serpents (ou le Predator), l’homme va développer des systèmes capables de modéliser des images à partir de zones de chaleur.

Durant la Seconde Guerre Mondiale, Allemands et Américains misent sur des « projeteurs à infra-rouges », systèmes passifs encombrants et énergivores qui préfigurent les caméras thermiques d’aujourd’hui;

L’intensification de lumière : comme les félins, on peut amplifier la lumière présente la nuit (lune, étoiles…) par le biais de tubes chargés principalement de photons, et obtenir ainsi, au travers de jumelles, une image relativement nette et de couleur verte (celle qui fatigue le moins l’œil humain). 

Testée pour la première fois au Vietnam, l’IL sera démocratisée durant la Guerre du Golfe en 1991. Elle est depuis devenue un équipement standard de toutes les armées modernes,  et ne cesse de se moderniser en matière d’ergonomie (il est notamment directement monté sur les casques), de qualité d’image et de champ de vision (FOV).

Les deux technologies ont leurs avantages et leurs inconvénients : le thermique permet de rapidement localiser des cibles, mais pas de les identifier avec précision. l’IL, quand à elle, pose principalement un problème de contraste. 

Le jeu vidéo et les JVN

Il est assez étonnant de constater que certains des jeux les plus marquants de ces dernières années ont fait le choix de la technologie « thermique » pour donner une identité particulière à leur personnage. Nous nous souvenons tous des « tritubes » de Sam Fisher dans Splinter Cell, même si dans la réalité, la vision thermique est aujourd’hui destinée à l’observation et surtout au tir à partir d’un véhicule…

On pourrait aussi faire une liste extrêmement longue des erreurs et approximations relevées dans l’utilisation des JVN dans les jeux vidéo, comme des combats dans des tunnels sans lumière, ou encore une absence de gestion des ombres, pourtant extrêmement présentes dans la pénombre.

Pourtant, c’est peut-être du jeu vidéo que viendra le futur de la vision nocturne. De nouvelles jumelles récemment révélées par l’US ARMY et Google montrent une vision en « fil de fer » qui rappelle le Virtual Boy de Nintendo, mais qui révèle surtout un niveau de détails et d’informations tactiques inégalés.

 

 

 

 

Drones et munitions rôdeuses : les nouveaux Stuka ?

Assez étrangement, le concept du drone kamikaze, aussi appelé « munition rôdeuse », est assez peu répandu dans le jeu vidéo (une exception, l’UCAV de Battlefield 4, uniquement disponible en multi).

 

Battlefield IV (2013)

 

 

Une munition rôdeuse, c’est quoi?

Dans la réalité, le concept n’est pas nouveau, loin de là. Le pionnier en la matière, Israël, le développe depuis les années 2000, notamment avec le HAROP. L’idée est simple : comme un oiseau de proie, le drone peut tournoyer pendant des heures au-dessus du champ de bataille et, s’il voit une proie, fondre sur elle. 

La différence principale entre un drone armé et une munition rôdeuse, c’est que le premier va tirer une munition pour détruire sa cible, alors que le second est lui-même la munition. Et s’il ne trouve pas de cible, il peut être récupéré, reconditionné et utilisé pour une nouvelle mission. 

un drone Harop

Le Nagorno-Karabakh, la première guerre des drones?

A l’automne 2020, le conflit du Nagorno-Karabakh a montré au monde la place que tiendraient désormais les drones « kamikazes », ou munitions rôdeuses.

De nombreuses vidéos montrent la destruction de chars ou de systèmes anti-aériens arméniens par des drones ou munitions rôdeuses azéries. Les HAROP et les BAYRAKTAR TB2 ont été d’autant plus efficaces qu’ils ont été déployés en essaim, et qu’ils ont donc saturé les défenses adverses, anéantissant à eux seuls des positions d’artillerie ou des positions fortifiées.

 

Un drone Azéri filme la frappe de deux autres drones

 

Un Gamechanger de la guerre?

Un drone turc Bayraktar TB2 vu de dos

Depuis le conflit du Haut-Karabakh, l’engouement pour les munitions rodeuses explose, Le marché des munitions vagabondes pourrait tripler d’ici 2030, faisant entrer la « guerre des drones » dans une phase industrielle, qui verra se démocratiser leur usage offensif.

Cette arme sera bientôt de tous les conflits, de la lutte anti-terroriste à l’affrontement entre blindés. Le processus est déjà engagé, les forces armées devront très vite trouver des solutions pour repenser leur défense aérienne et la protection contre les drones, y compris au niveau tactique. 

deux chars arméniens en passe d'être détruits par un drone azéri

 

Une arme de guerre psychologique?

Le drone est massivement rejeté par les populations depuis la « War of Drones » de Barack OBAMA, et la multiplication des frappes (y compris dans des pays où les forces armées américaines ne sont pas présentes) par les PREDATOR et les REAPER. Pourtant, c’est bien au cours du conflit du Haut-Karabakh que le drone est devenu un instrument de propagande et, plus encore peut-être, de guerre psychologique. 

Les témoignages des combattants, mais aussi des civils, font directement allusion aux célèbres « Stuka » de la Seconde Guerre Mondiale, et comparent le bourdonnement des drones à la funeste sirène du bombardier en piqué allemand, sirène dont le but n’était autre que diffuser la terreur.

Que l’on soit sur les plages de Dunkerque en 1940 ou sur les plateaux du Caucase en 2020, il n’y a plus d’endroit pour se cacher, plus de période de répit… le soldat ne dispose plus de liberté de manœuvre, et le civil voit son esprit de résistance brisé. Craignez donc le bourdonnement des drones!