Depuis le début de l’invasion russe de l’Ukraine, on entend régulièrement parler de systèmes d’armes portatifs tels que le NLAW, le Carl Gustaf ou encore le désormais célèbre Javelin.
Ces matériels, souvent amalgamées sous le terme de « lance-roquettes », se retrouvent souvent dans les jeux vidéo, dont ils sont devenus une arme mythique, au même titre par exemple que le shotgun.
De manière générique, le lance-roquettes représente l’arme lourde par excellence et sert souvent de deus ex machina scénaristique qui permet au joueur de se sortir de toutes sortes de situations à l’aide de sa puissance de feu.
Néanmoins, cette représentation est simpliste. On utilise le terme « lance-roquettes » pour décrire des systèmes d’armes pourtant bien différents dans leur fonctionnement et leur utilisation, malgré une évidente similitude visuelle.
Essayons de faire le tri entre impératifs de gameplay et réalité.
1°) Un peu d’histoire
Si les premiers lance-roquettes datent de la chine médiévale et que Léonard de Vinci avait eu l’idée d’un lance-roquettes multiples, c’est bien lors de la 2nd guerre mondiale que les lance-roquettes portatifs font leur apparition, avec pour vocation principale la lutte anti-char. Les deux premiers modèles sont le bazooka américain en 1943, et son équivalent allemand le Panzerschreck en 1944.
En parallèle, les Allemands développent aussi, à partir de 1942, un lanceur de charge anti-char à usage unique, le Panzerfaust, dont les soviétique s’inspireront largement pour en créer une version réutilisable et promise à un grand avenir, le RPG.
Au sortir de la guerre, la principale distinction se fait donc entre système réutilisables ou consommables. Elle reste aujourd’hui primordiale, notamment en termes de côuts[1].
Enfin, ce n’est qu’à la fin des années 60, avec la miniaturisation de l’électronique et des missiles, qu’apparaissent les lances missiles portables avec deux grandes catégories : les Anti Tank Guided Missile (ATGM) ou Man-Portable Air-Defense System, (MANPADS).
2°) Même aspect général, missions différentes
Aujourd’hui, il existe trois grandes familles d’armes portatives : les armes sans recul, les lance-roquettes et les lances missiles.
Visuellement, les différents systèmes se ressemblent (il s’agit d’un tube équipé d’un viseur et d’une poignée) et leurs différences s’observent principalement autour de leur système de propulsion et de guidage.
Ainsi, pour une arme sans recul (type Carl Gustaf), la propulsion se fait, sur un mode similaire aux obus ou aux balles, à l’intérieur du canon et avec de la poudre. Quant aux lance-roquettes et aux lance-missiles, ils utilisent des munitions auto propulsées avec du carburant la plupart du temps solide.
Autre distinction importante : le guidage. Pendant longtemps, seule la catégorie des lance-missiles possède, de fait, cette capacité (en filaire pour des engins comme le Milan, et en autonome pour des missiles comme le Javelin), mais des lance-roquettes récents, comme le NLAW, intègrent aussi une part d’assistance électronique au guidage avant le tir.
3°) Des armes portatives pour quels usages ?
Les différences que nous avons listées ne sont pas uniquement liées à des problématiques économiques ou techniques. Elles servent avant tout à répondre à des problématiques hétérogènes posées par des doctrines d’emplois et des réalité opérationnels très variés.
Globalement, les systèmes consommables, généralement plus simples et légers comme les AT4 ou les NLAW, sont souvent directement intégrés aux unités (1 hommes le porte en plus de son arme règlementaire).
Mais le Carl Gustaf, qui offre un panel de munitions uniques, est aussi parfaitement adapté à cet usage, notamment au sein des Forces Spéciales dont la plupart en sont équipées.
Les systèmes réutilisables trouvent quant à eux plus souvent leur place au sein d’unités spécialisés (de lutte anti-char ou anti-aérienne notamment) car ils sont plus lourds et plus complexes. Mais on peut citer le contre-exemple du Stringer, qui a été le Game changer dans la guerre menée par les Moudjahidine afghans contre les Soviétiques dans les années 80.
Quoi qu’il en soit, l’industrie du jeux vidéo aurait tout à gagner à faire preuve de plus d’authenticité, voire de réalisme dans sa représentation des matériels militaires portables afin de développer des expériences et des scénarios plus immersifs, répondant par là à la demande de joueurs toujours plus exigeant en la matière.
[1] En effet, les systèmes consommables sont généralement moins chers : environ 4500 dollars pour un AT4 et 27 000 pour un NLAW, contre près de 200 000 pour un javelin (80 000 pour le missile et 120 000 pour la station de tir) ou encore 20 000 pour un Carl Gustaf et quelque milliers d’euros en plus par munitions.